Ce mois-ci, la sonnerie met à l’honneur l’abolition de l’esclavage (commémoré le 10 mai en France) et la « Saison des droits humains » organisée par la ville de Nantes (thème : la conquête des droits et libertés), avec un negro-spiritual de Louis Armstrong, Go Down Moses.
Après Johann Sebastien Bach, place au negro-spiritual avec Louis Armstrong et Go Down Moses. Souvent considéré comme le principal popularisateur voire inventeur du jazz, ce fut un extraordinaire trompettiste, et un chanteur à la voix très particulière, surnommé « Satchmo » (« bouche de sacoche »). Il est aussi emblématique du fait que l’abolition de l’esclavage n’est qu’une étape et de la situation des Noirs américains au début du XXe siècle, en butte au racisme et à la ségrégation : né à la Nouvelle-Orléans dans un milieu très pauvre, placé à 13 ans en maison de correction, ne sachant pas lire la musique, il se met pourtant à composer en improvisant et enregistre ses premiers disques au début des années 20 avec son orchestre Hot five. Il devient ensuite une véritable star.
Pour écouter le morceau en entier : https://www.youtube.com/watch?v=vf6jBP4YXwo
Ce choix musical nous rappelle combien la musique (blues, jazz) résonne avec la condition des Noirs américains. En effet Go Down Moses, titre de l’album Louis and the Good Book (le « livre saint » pour les Afro-américains) est un negro-spiritual, inspiré par l’Ancien Testament. Les negro spirituals sont des hymnes baptistes et méthodistes mêlant les origines africaine et européenne qui se créent pendant la période de l’esclavage ( 1619 –1865). Ils précèdent la naissance du Gospel (de « Godspell », parole de Dieu), lequel se développe durant la ségrégation (1876–1964) et exprime la souffrance des Afro-américains en butte au racisme et à la misère dans le sud des Etats-Unis (anciens Etats esclavagistes) .
Les esclaves venus d’Afrique avec leur culture, leurs traditions et leurs croyances, travaillent dans les champs de coton au rythme de leurs Worksongs (chant a cappella, improvisé par un chanteur et repris par un chœur) et de leurs Hollers ( ensemble de brefs cris et interjections).Tout leur est interdit sauf de chanter car les planteurs se rendent comptent que le chant améliore la productivité de leurs esclaves. Avec l’évangélisation des esclaves, qui se généralise au XVIIIe, naissent les Negro spirituals : les thèmes en sont la rédemption, le triomphe de l’espoir sur la misère et la délivrance. Ces chants reflètent la foi profonde des Afro-américains et renferment parfois des messages cachés de résistance. La plupart des maîtres d’esclaves ne peuvent pas les comprendre, ou sont obligés de les tolérer, et ce d’autant qu’il faut bien évangéliser grâce à la musique, savoir lire et écrire étant interdit aux esclaves.
Ici Israël représente les esclaves africains d’Amérique, l’Égypte et le Pharaon représentent les maîtres esclavagistes. Bien que l’esclavage ait été aboli en 1865, les Afro-américains continuent au début du XXe siècle à subir la ségrégation, les discriminations, les exactions du Ku Klux Klan, etc. Ce chant garde donc tout son sens.
Claude Nougaro reprit la mélodie en 1965 pour en faire un magnifique hommage à Armstrong : https://www.youtube.com/watch?v=w7xXzoDLmyI
Pour visiter le Mémorial de l’esclavage : http://memorial.nantes.fr/
Programme de la Saison des droits humains : https://www.nantes.fr/droitshumains
Festival des 3 continents (thème 2019 : le cinéma afro-américain) : http://www.3continents.com/fr/